dimanche 16 février 2020

Lord Byron

Lord Byron


Lord Byron


George Gordon Byron, 6e baron Byron, généralement appelé Lord Byron, est un poète britannique, né le 22 janvier 1788 à Londres et mort à 36 ans le 19 avril 1824 à Missolonghi, en Grèce, alors sous domination ottomane. Il est l'un des plus illustres poètes de l'histoire littéraire de langue anglaise.

Un poète ! Mais alors, me direz-vous, que vient-il faire dans ce blog sur la musique ? 

Il se trouve que Lord Byron a influencé de nombreux compositeurs romantiques et suscité un certain nombre de chef-d’œuvres chez ces derniers, c'est pourquoi j'ai souhaité parler de ce personnage fascinant.

Mais commençons par quelques mots sur Lord Byron lui-même et son oeuvre. Voici quelques-uns des faits remarquables de sa vie :
  • Il naît avec un pied bot, il gardera toute sa vie une chaussure orthopédique et un léger boitement. Pour compenser cela il s’adonnera à de nombreux sports tels que la nage, la boxe ou l’escrime. C’est notamment un excellent nageur, puisqu’il traverse l’Hellespont (détroit des Darnadelles) à la nage.
  • Il est orphelin de père à 3 ans et est élevé par une mère irascible qui rejette sur lui la colère qu’elle éprouve pour son père, il en gardera un caractère difficile et irritable
  • C’était un élève indiscipliné mais très intelligent
  • Après avoir connu la célébrité pour son oeuvre, ses relations incestueuses avec sa demi-sœur Augusta éclatent au grand jour, c’est le scandale qui l’oblige à s’exiler d’Angleterre qu’il ne reverra jamais
  • En Italie, Byron s’associe aux projets des Carbonari, il finance même leur mouvement. Mais ceux-ci essuient une défaite qui les met à mal, Byron passe à autre chose.
  • Il fait un séjour en Suisse, à la villa Diodati, près du lac Léman. C’est là qu’il fait la rencontre des époux Shelley. Il devient un très grand ami du poète Percy Shelley. Suite à une semaine ininterrompue de mauvais temps et étant tous bloqués dans la villa de Byron, celui-ci, pour occuper ses amis, suggère un concours : ils doivent écrire une histoire fantastique qui fasse peur : c’est de cette idée que naît le roman Frankenstein de Mary Shelley.
  • Enfin, ayant la prémonition qu’il va mourir jeune, il n’hésite pas à financer et à se lancer dans une tentative de libération de la Grèce qui vit sous le joug de l’occupation ottomane. Il deviendra ainsi un héros pour les Grecs. Malheureusement, prématurément vieilli et fatigué, il contracte la fièvre des marais lors d’une de ses courses quotidiennes à cheval et meurt à Missolonghi à 36 ans.
  • Je mentionnerai également, pour l’anecdote, que bien qu’il l’ait abandonnée toute jeune, il est le père de Ada Lovelace qui fut une pionnière de l’informatique et qui est considérée aujourd’hui comme étant la première personne à avoir réalisé un programme informatique.  

Ses principales œuvres sont Mazeppa, Childe Harold’s Pilgrimage (Le pèlerinage du Chevalier Harold), La Fiancée d’Abydos, Le Corsaire, Parisina, Marino Faliero, Le Prisonnier de Chillon, Manfred, La Complainte du Tasse, Don Juan, Sardanapale, Le Giaour, Les Deux Foscari.

J'ai réalisé une playlist des principales œuvres musicales inspirées par le poète.


Voici une sélection des œuvres de Lord Byron et des pièces musicales les plus remarquables qui en ont été inspirées.

Childe Harold’s Pilgrimage

"Le Pèlerinage de Childe Harold" est un long poème narratif en quatre chants. Il a été publié entre 1812 et 1818 et est dédié à "Ianthe". 

Le poème décrit les voyages et les réflexions d'un jeune homme fatigué du monde qui, désillusionné par une vie de plaisirs et de débauches, cherche une distraction dans les pays étrangers. 

Le titre du poème provient en partie du terme "childe", titre médiéval pour un jeune homme cherchant à gagner ses éperons de chevalier.  Ce poème contient une bonne partie d’éléments autobiographiques.

Berlioz – Harold en Italie


Inspiré par le poème de Byron et par une commande de Paganini, Berlioz compose en 1834 cette symphonie en quatre mouvements avec alto solo. Il faut considérer que dans cette oeuvre l’alto n’est pas utilisé par Berlioz comme dans un concerto, il est moins présent et a un rôle plus limité, même si ses interventions sont remarquables. 

Paganini, tout d’abord déçu de cela, finit par admirer ce chef-d’oeuvre à sa juste valeur et fit un don très substantiel à Berlioz.

La symphonie dure une quarantaine de minutes environ et comprend quatre mouvements :
  1. Harold aux montagnes : scènes de mélancolie, de bonheur et de joie (Adagio-Allegro) = 15'
  2. Marche des pèlerins chantant la prière du soir (Allegretto) = 7'
  3. Sérénade d'un montagnard des Abruzzes à sa maîtresse (Allegro assai-Allegretto) = 6'
  4. Orgie de brigands. Souvenirs des scènes précédentes (Allegro frenetico-Adagio) = 11'

Mes versions favorites au disque sont celles de Leonard Bernstein dirigeant l’Orchestre National de France et Donald McInnes à l’alto et de François-Xavier Roth à la tête de l’orchestre Les Siècles et Tabea Zimmermann à l’alto. 

Sur Youtube, j'ai sélectionné la version d'Eliahu Inbal à la tête du Frankfurt Symphony Orchestra avec Antoine Tamestit à l'alto:



Le Corsaire

Ce poème publié en 1814 est composé de trois chants. Il eut un succès retentissant dès sa sortie : dix mille exemplaires sont vendus le premier jour. 

Il raconte les aventures mouvementées de Conrad un pirate grec qui décide d’attaquer le pacha turc. Après des mésaventures il sauve les femmes du harem du pacha, dont la favorite Gulnare qui tombe amoureuse de lui et tue le pacha. 

Ils s’enfuient ensemble, mais Conrad n’a qu’une idée : retrouver la femme qu’il aime : Medora. Mais, celle-ci pensant que son amant était mort, s’est suicidée. Fou de douleur Conrad s’enfuit et disparaît.

Ce poème a inspiré de nombreuses œuvres musicales.

Berlioz - Ouverture Le Corsaire


Berlioz compose l’ouverture Le Corsaire qui est créée en 1845. Il s’agit d’une ouverture vive et flamboyante. Je recommande la version dirigée par Colin Davis.

En vidéo, j'ai sélectionné une version dirigée par Paavo Järvi:



Verdi - Il Corsaro


Verdi compose en 1848 un opéra intitulé "Il Corsaro" sur un livret de Francesco Maria Piave d’après Byron. Cet opéra n’aura pas un grand succès. 

Au disque, une version de référence est celle dirigée par Lamberto Gardelli avec Montserrat Caballé, Jessye Norman et José Carreras. On retiendra en particulier la cavatine : "Ne sulla terra".

Voici la version audio de cette cavatine par Montserrat Caballé.



Adam - Le Corsaire


Enfin, cette oeuvre a inspiré un ballet au compositeur français Adolphe Adam créé en 1856 à l’Opéra de Paris. Il existe peu de versions au disque de ce ballet, je citerai celle dirigée par Richard Bonynge. 

Le passage le plus célèbre est le pas de deux de la scène 2 de l’acte I. Voici une superbe prestation des danseurs Ivan Vasiliev (Conrad) et Iana Salenko (Medora):



A noter que le harpiste et compositeur français Nicolas-Charles Bochsa a également composé un ballet sur le Corsaire, qui depuis est tombé dans l’oubli.

Parisina

Il s’agit d’un poème publié en 1816. Le récit se déroule en Italie au xve siècle. 

Parisina se rend nuitamment auprès de son amant, Hugo, puis retourne dans son lit auprès de son mari. Parisina parlant dans son sommeil, son époux, le duc d’Este Azo, découvre son infidélité, et que son amant n'est autre que son fils adultérin. 

Azo fait décapiter son fils sous les yeux horrifiés de son épouse. Plus tard, elle disparaît (probablement dans un couvent) tandis qu'il se remarie et fait d'autres enfants mais pleure son fils perdu.

Donizetti – Parisina


Le sujet de cet opéra de Donizetti est bien entendu emprunté au poème homonyme de Lord Byron fondé sur des faits historiques. 

Le livret prend de très grandes libertés avec la vérité historique. Outre le fait que certains noms sont modifiés, Ugo devient dans l’opéra le fils légitime (né d’un premier mariage) d’Azzo, même si ce dernier en ignore l’existence. 

Après qu’on lui a révélé qu’Ugo est son fils, Azzo le fera néanmoins exécuter, Parisina mourant de douleur à la vue du cadavre d’Ugo. 

J’ai sélectionné l’air "Sogno talor di correre" interprété par Carmen Giannattasio dans le rôle de Parisina et Ann Taylor dans celui d’Imelda.



Manfred

Caspar David Friedrich - Voyageur contemplant une mer de nuages

Il s’agit d’un drame publié en 1817. 

Plein de remords après avoir tué Astarté, celle qu'il aimait, Manfred vit seul comme un maudit au cœur des Alpes. Astarté, la femme qu'il a aimée puis tuée par son étreinte (« My embrace was fatal... I loved her and destroy'd her »), lui apparaît. 

Répondant à son invocation, elle lui annonce sa mort pour le lendemain. Au moment prédit apparaissent des démons pour s'emparer de lui, mais Manfred leur dénie tout pouvoir sur sa personne. Pourtant, à peine sont-ils apparus qu'il meurt. 

La personnalité de Manfred composera le portrait de l'homme fatal du romantisme. 

Ce drame romantique par excellence va susciter des œuvres sublimes.

Schumann – Ouverture de Manfred


Ecrit en 1848, Manfred est un poème dramatique avec musique en trois parties (Opus 115).

L'œuvre se compose d'une ouverture, d'un entracte, de mélodrames et de plusieurs solos et chœurs. 

Ma version favorite de l’ouverture est celle de George Szell dirigeant le Cleveland Orchestra:



En version live, j'ai choisi celle de Marek Janowski:




Tchaïkovsky – Manfred-Symphonie


La Symphonie Manfred en si mineur op. 58 est en quatre scènes. Composée entre mai et septembre 1885, elle est créée à Moscou, en mars 1886. 

La symphonie est dédiée à Mili Balakirev, qui en proposa le thème à Tchaïkovsky et s’efforça de diriger son travail. Au départ Tchaïkovsky était plus qu’hésitant à se lancer dans ce projet, mais lorsqu’il lu le drame de Byron il se laissa convaincre. 

Même si Tchaïkovsky a ensuite manifesté un rejet total de cette partition, il faut reconnaître qu’il s’agit d’une des plus belles symphonies du compositeur.

Vasily Petrenko en donne une version d’un romantisme exacerbé qui convient particulièrement bien à l’oeuvre.



La complainte (ou lamentation) du Tasse

De passage à Ferrare en 1817, Byron fait resurgir la difficile destinée de Torquato Tasso, dit "le Tasse" (auteur de l’épopée "La Jerusalem délivrée"), jugé dément et voué aux cachots. 

Histoire de geôle, "La Lamentation du Tasse" contribuera à entretenir un mythe tenace et influent, une histoire vibrante et mystérieuse.

Liszt – Tasso, Lamento e Trionfo.


Tasso, Lamento e Trionfo S.96 est un poème symphonique composé par Franz Liszt en 1849. Il le révisera en 1850 - 1851 et de nouveau en 1854. 

Il est le 2e des 13 poèmes symphoniques écrits par le musicien durant son séjour à Weimar. 

L'oeuvre se divise en deux parties. Le Lamento met en lumière les incertitudes du poète, en proie à une douleur causée par sa passion pour la princesse Léonore d’Este et par l’absence de reconnaissance. Le Trionfo, éclatant, reflète la gloire du poète dont le talent est enfin reconnu. "Le thème initial s’est métamorphosé en un chant de victoire" (François-René Tranchefort). Un menuet vient s’insérer au cœur de l’œuvre et traduit les années sereines passées auprès de la famille d’Este à Ferrare.

On sélectionnera avec plaisir l’intégrale des poèmes symphoniques de Liszt par Bernard Haitink à la tête du London Philharmonic Orchestra.

Sur Youtube, j'ai sélectionné une autre excellente version dirigée par Kurt Masur à la tête de l'orchestre du Gewandhaus de Leipzig.



Sardanapale

Eugène Delacroix - La Mort de Sardanapale

Sardanapale est un drame publié en 1821 en Angleterre et traduit en France dès 1822.

Il raconte la fin tragique de Sardanapale, roi légendaire de Ninive en Assyrie, qui, voyant le pouvoir lui échapper à la suite d’une conspiration, choisit, lorsqu'il se rendit compte que sa défaite était inéluctable, de se jeter en compagnie de sa favorite, Myrrha (une esclave ionienne), dans les flammes d’un gigantesque bûcher. 

Le poème a inspiré à Eugène Delacroix "La Mort de Sardanapale", à Hector Berlioz une cantate, qui lui valut ses premiers succès, à André Caplet et Maurice Ravel des cantates également (intitulées Myrrha) pour le prix de Rome en 1901. 

Ce que l'on sait moins c'est que cette oeuvre à également inspiré Franz Liszt.

Liszt – Sardanapalo


Après quelques essais embryonnaires, Liszt a bel et bien composé un opéra: "Je vais essayer de composer à mon tour un opéra, rien que ça !" écrit-il à Marie d'Agoult en 1846. 

Ainsi naîtra en 1850 le premier acte de "Sardanapale" opéra qui reste inachevé puisque Liszt en abandonne la composition deux ans plus tard, peut-être a-t-il attendu en vain que le livret, en italien, soit terminé par l’auteur qui est resté anonyme. 

Abandonnée, enfouie dans les archives de Weimar, la partition a été retrouvée, reconstituée et orchestrée par le musicologue britannique David Trippett, sur la base des indications laissées par le compositeur. 

L'opéra, ou du moins son premier acte, le seul achevé, a été créé à Weimar en Août 2018. 

La musique fait beaucoup penser à du Berlioz, elle est flamboyante, et montre ce que Liszt aurait pu donner à l’opéra s’il en avait pris le temps. 

En 2019, le chef ukrainien Kirill Karabits nous en livre au disque une superbe version avec une distribution emmenée par la soprano Joyce El-Khoury dans le rôle de Myrrha.

En voici un extrait en concert:





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