mardi 29 mars 2022

Jethro Tull

 

Jethro Tull

Jethro Tull


Jethro Tull est un groupe britannique de rock, originaire de Blackpool, en Angleterre. Formé vers 1967, sa musique est marquée par le style vocal très particulier du leader Ian Anderson (une voix nasillarde mais remarquablement juste), son travail unique de flûtiste, et par des constructions de chansons inhabituelles et souvent complexes. 

La musique du groupe incorpore des éléments de musique classique et celtique, du blues (surtout à ses débuts), et connaît des phases allant du rock alternatif au hard rock en passant par le rock progressif. En simplifiant, on pourrait dire que Jethro Tull est le principal représentant du "folk progressif".

Le groupe a connu de nombreux changements d'instrumentistes au cours de sa carrière (notamment concernant la basse, la batterie et les claviers), mais se caractérise par la présence permanente de son leader charismatique, virtuose de la flûte, chanteur et auteur-compositeur Ian Anderson.

Sur la photo ci-dessus, j'ai choisi de vous présenter le groupe à son apogée, c'est-à-dire lors de la sortie de l'album Thick as a Brick en 1972. Vous avez de gauche à droite: Ian Anderson (chant, flûte, guitare, etc.), John Evan (claviers), Jeffrey Hammon (basse), Barriemore Barlow (batterie) et Martin Barre (guitariste du groupe de 1968 à 2012).

Le groupe a sorti 22 albums studio depuis sa création et a reçu un Grammy Award en 1988 pour le meilleur album hard rock de l'année: Crest of a Knave. 

Il est toujours actif aujourd'hui et a sorti son dernier album en 2022: The Zealot Gene.

A noter que le groupe tire son nom d'un agronome du XVIIIème siècle qui a inventé le semoir en 1701, et que c'était le nom du groupe lorsqu'il a signé avec la compagnie de disques.

Si j'ai choisi de vous parler de ce groupe, c'est que je le considère comme un groupe important, par l'originalité de sa discographie et de son leader, car il n'est pas courant d'entendre de la flûte dans le rock. Il faut noter également la qualité des prestations scéniques du groupe et la qualité des paroles.

Voici une sélection des meilleurs albums et des meilleures chansons du groupe.

D'autre part, je vous ai concocté sur les principales plateformes de streaming une playlist avec les meilleurs morceaux du groupe.





1968 - This Was



This Was est le premier album studio de Jethro Tull. Il est sorti le 25 octobre 1968 sur le label Island et a été produit par Terry Ellis et le groupe.

Après un premier single, Sunshine (paru sous le nom de groupe Jethro Toe) sorti en février 1968 et produit par Derek Lawrence, le groupe signe avec le label Island Records et entre dans les studios Sound Techniques de Londres pour enregistrer son premier album. Il s'agit de l'unique album du groupe avec le guitariste Mick Abrahams.

This Was reste classé 17 semaines dans les charts britanniques, culminant à la dixième place.

Il s'agit d'un album plus bluesy que ses successeurs.

J'ai sélectionné "Serenade To A Cuckoo", un morceau plutôt jazzy, dans une version live à Lugano en 2005.


Voici "Dharma For One", un morceau instrumental avec un solo de batterie, dans une version live à Bâle en 2008.



1969 - Stand Up


Il est le premier album avec Martin Barre à la guitare en remplacement de Mick Abrahams parti former Blodwyn Pig. Il fut enregistré en avril 1969 dans les studios Morgan de Londres à l'exception de Bourée qui fut enregistré dans les Studios Olympic de Londres le 24 avril 1969. 

Il entre directement à la première place des charts britanniques où il restera classé pendant 29 semaines. Il se classa à la 20e place du Billboard 200 et fut certifié disque d'or aux États-Unis en 1972 pour la vente de plus de 500 000 exemplaires.

Il contient l'un de leurs plus fameux titres, "Bourée", une adaptation de "Bourrée" de la suite pour luth n° 1 en Mi mineur de Jean-Sébastien Bach (BWV 996). En voici une version live de 2005 à Lugano.


Le titre "We Used To Know" parle des mauvais jours du passé quand le groupe n'était pas connu et que les musiciens étaient en galère. La progression d'accords du morceau a largement été réutilisée par le groupe Eagles (qui avait joué en même temps que Jethro Tull) sur le titre "Hotel California".


Le protagoniste du morceau "Living In The Past" aime une femme et ne veut pas penser à la guerre actuelle (la guerre du Vietnam), mais plutôt penser au passé et ne pas prendre part à la révolution (les mouvements hippies pacifistes). Voici une version live de 1976 où l'on retrouve Ian Anderson chevelu!



1970 - Benefit



L'album est enregistré pendant les mois de décembre 1969 et janvier 1970 aux Studios Morgan à Londres et est produit par Ian Anderson. C'est certainement l'album le plus sombre et le plus cynique du groupe, le résultat de l'incompréhension de Ian Anderson envers l'industrie du disque et les pressions commerciales des maisons de disques.

C'est le premier album avec John Evan aux claviers. C'est aussi le dernier avec le bassiste Glenn Cornick qui quittera le groupe à la fin de la tournée en décembre 1970. 

C'est le premier album de Jethro Tull a dépasser le million d'exemplaires vendus.

Dans "To Cry You A Song", le héros revient d'un voyage en avion vers sa bien-aimée pour lui "crier" une chanson. Il est très doux pour lui de la retrouver. On remarquera le riff de guitare très original.


On trouve sur le même album la chanson "Teacher", qui s'intéresse aux donneurs de leçons qui s'intitulent eux-mêmes "Professeur" et qui recommandent à l'artiste de prendre du plaisir en voyageant, ou en se bronzant sur la plage. Le "professeur" a d'ailleurs bien profité de ce que l'artiste lui à offert. Mais cela ne satisfait pas l'artiste qui a d'autres idées sur la vie.



1971 - Aqualung


Aqualung est le quatrième album studio du groupe Jethro Tull, sorti en 1971 par le label Chrysalis Records. Il est considéré, malgré le désaccord des membres du groupe à ce sujet, comme un album-concept abordant le thème de la distinction entre Dieu et la religion. Ian Anderson compose et écrit l'intégralité des chansons.

L'album est enregistré aux Island Studios à Londres, avec John Evan et Jeffrey Hammond qui participent à leur première séance d'enregistrement avec le groupe, respectivement en tant que claviériste et bassiste.

Plus de 7 millions de copies d'Aqualung sont vendues, en faisant l'incontestable succès de la formation britannique. L'accueil critique est très favorable, l'album figurant régulièrement dans des classements établis par les critiques. Grâce au succès commercial international de l'album, Jethro Tull accède à une notoriété mondiale et s'impose comme un des pionniers du rock progressif britannique.

Il s'agit certainement d'un des meilleurs albums du groupe. 

La chanson "Aqualung" traite de notre réaction face à la population des sans-abri. Ian Anderson a écrit la chanson et l'a appelée "une chanson de confusion empreinte de culpabilité sur la façon dont vous traitez les mendiants, les sans-abri".

Dans cette chanson, Aqualung est un sans-abri avec une mauvaise hygiène. Ian Anderson l'a écrit en s'inspirant de photographies réelles de sans-abri. La femme de Ian à l'époque, Jennie, était une photographe amateur et avait apporté des photos à Ian sur ce sujet.

Ian intitule la chanson "Aqualung" d'après un appareil respiratoire portable pour les plongeurs. Anderson a imaginé ce surnom à cause de problèmes respiratoires qu'il imagine au sans-abri.

Ce qu'Anderson ne savait pas, c'est qu'Aqualung était un nom de marque et qu'il a risqué un procès qui finalement n'a pas eu lieu.

La couverture de l'album est une aquarelle du personnage Aqualung créée par l'artiste Burton Silverman. Burton a pris quelques photos d'Ian Anderson portant son vieux pardessus avant de peindre la couverture, et le travail qui en a résulté ressemble beaucoup à une version hagarde d'Ian. Malgré les réticences d'Anderson, qui n'en était pas satisfait, la couverture est devenue une image emblématique du rock.

Voici une version donnée à Montreux en 2003 de ce titre légendaire.


On continue la galerie de portraits de gens bizarres, effrayants ou amusants que Ian Anderson a rencontré dans Londres en se promenant avec le titre "Mother Goose". Cette chanson est écrite comme une comptine aux accents folk. Voici une version donnée à Lugano en 2005.


Voici enfin mon morceau préféré "Locomotive Breath", écrit par Ian Anderson.

La locomotive de cette chanson échappe à tout contrôle et est une métaphore des problèmes de notre société. 

Anderson a donné une explication détaillée de la chanson dans une interview de 2013 , où il a déclaré: 

"Quand je l'ai écrite, je n'avais pas délibérément voulu écrire un morceau de musique sur un sujet particulier. Mais cela a évolué au cours du processus d'écriture pour devenir pas très spécifique, mais sur les problèmes de surpeuplement - la sensation plutôt claustrophobe de beaucoup de gens dans un espace limité. Et l'idée de la locomotive imparable incessante étant la métaphore de l'expansion apparemment imparable de la population sur la planète Terre.

Quand je la regarde aujourd'hui, elle devient, pour moi, très cristallisée en tant que chanson sur l'expansion ingérable de la population. C'est quelque chose qui me préoccupe encore plus aujourd'hui qu'à l'époque où je l'ai écrit, lorsque la population de la planète Terre n'était qu'environ les deux tiers de ce qu'elle est aujourd'hui. 

Ainsi, au cours de ma seule vie, nous avons vu une énorme augmentation de la population et une énorme augmentation de la mesure dans laquelle nous dévorons nos ressources limitées. Donc, l'idée de la planification et de la gestion de la population est quelque chose à laquelle je pense que nous devrions réfléchir beaucoup plus que nous ne le faisons. 

Cela signifie-t-il que je pense que nous devrions stériliser tout le monde après l'âge de 30 ans ? Non bien sûr que non. La taille de la famille que vous souhaitez avoir sera votre choix. Mais vous devez faire ce choix en toute connaissance de cause, avec sagesse et responsabilité."

Cela fait réfléchir, non ?

On retrouve le côté implacable de cette locomotive imparable et incessante dans le rythme de la chanson. En voici une version live aux AVO Sessions, un morceau d'anthologie!



1972 - Thick as a Brick



Thick as a Brick est le cinquième album de Jethro Tull. Il est sorti le 3 mars 1972 sur le label Chrysalis Records et fut produit par Ian Anderson.

En réaction aux critiques qui qualifiaient l'album précédent du groupe, Aqualung, d'« album-concept », contre l'avis même de Ian Anderson, celui-ci décide d'écrire et enregistrer un véritable album-concept sur un mode ironique, composé d'une seule chanson occupant la totalité de l'album (soit 43 minutes).

Les paroles sont présentées comme un poème écrit par Gerald Bostock, un enfant de huit ans, qui avait reçu un prix pour son œuvre avant de se le voir retirer pour avoir prononcé un gros mot à la télévision ; l'article en « une » de la pochette décrit en détail cette affaire totalement fictive.

Il s'agit du premier album du groupe à se classer en tête du Billboard 200, et, d'une manière générale, il est considéré comme le meilleur album du groupe par les amateurs de rock progressif.

Voici un extrait d'une interview de Ian Anderson donné le 23 décembre 1991 dans l'émission US radio show dans laquelle il explique les paroles de la chanson "Thick as a Brick":

"Thick as a Brick", qui peut se traduire par "Épais comme une brique", est vraiment une expression d'argot du nord de l'Angleterre, où j'ai passé mes (enfin, une partie de mes) années de jeunesse. Décrire quelqu'un comme étant 'épais comme une brique' signifie, en gros, qu'il est stupide. Vous savez, être "épais", comme dans "tête épaisse", épais comme une "brique", la brique étant un petit objet dense. Donc je parlais vraiment des gens qui sont intellectuellement incapables d'absorber quoi qu'il ait pu être dit dans les termes légèrement fantomatiques et explosifs des paroles de l'album."

"La façon dont j'écris permet à beaucoup de gens d'interpréter à leur manière. Je ne dis pas qu'une seule chose. Je dis beaucoup de choses à beaucoup de gens. La musique signifie différentes choses pour différentes personnes." 

"Je tiens à insister pour que chaque auditeur fasse un petit effort pour écouter la musique, les paroles, et interpréter ce que je dis. Mes mots font sortir des antennes. C'est aux auditeurs de les capter et d'obtenir d'eux ce qu'ils souhaitent."

Ian Anderson ne se fait d'ailleurs pas d'illusion et dit dans la chanson: "I may make you feel but I can't make you think" ("Je peux vous faire ressentir mais je ne peux pas vous faire réfléchir").

Il s'agit d'une sorte de mélange entre une pièce de théâtre et une fable, avec la morale: "Ne suis jamais aveuglément quelqu'un d'autre, surtout s'il dit qu'il sait mieux que toi, car il est fort probable qu'il ne le sache pas. Pense par toi même."

Pour ceux qui sont intéressés par plus de détails, le texte intégral en anglais et en français de l'album est disponible à l'adresse suivante:

https://jethrotull.com/taab-french-translation/

J'ai sélectionné deux extraits de cet album. Le premier est une version live interprétée en Islande en 2014, un des sommets musicaux du groupe.


J'ai complété par l'extrait suivant: "What Do You Do When The Old Man's Gone ? / From The Upper Class".




1972 - Château d'Isaster Tapes



Ne cherchez pas d'album avec ce titre dans la discographie de Jethro Tull, il n'existe pas. En effet, en 1972, Jethro Tull se rend au mythique studio d'enregistrement du Château d'Hérouville (je consacre d'ailleurs un article complet au Château d'Hérouville sur cette page) et enregistre quelques titres, mais ces morceaux ne sortiront pas sur l'album suivant. Au lieu de cela, le groupe enregistrera l'album "A Passion Play" en reprenant, dans une version différente, deux titres enregistrés à Hérouville.

J'ai comparé, et personnellement je préfère les titres enregistrés à Hérouville.

Ces enregistrements apparaissent dans le premier CD de la compilation (en 2 CDs) parue en 1993 et intitulée: "Nightcap - The Unreleased Masters".

Ian Anderson explique le projet sur les notes de pochette de Nightcap en septembre 1993:

"Cette collection d'enregistrements inédits est maintenant disponible à la demande des nombreux fans inconditionnels de Tull qui ont appris, au fil des ans, l'existence du matériel. 

La plupart des sessions des albums studio passés ont produit une chanson supplémentaire ou tantôt ces morceaux n'ont pas réussi à figurer sur un disque parce qu'ils ressemblaient trop à l'un de leurs frères et sœurs : tantôt, comme l'oreille peut le détecter, parce qu'ils étaient trop différents !

Le tristement célèbre enregistrement de 1973 au château d'Hérouville (il semble que les sessions ont eu lieu en décembre 1972 et en janvier 1973), près de Paris, n'a jamais été achevé en raison de problèmes de santé, de problèmes techniques et de production, et de la décision soudaine du groupe de retourner au Royaume-Uni après un exil fiscal temporaire et mal avisé. Plutôt que de continuer avec les "Chateau Tapes", nous avons décidé de recommencer avec une oeuvre quasiment nouvelle qui est rapidement devenue "A Passion Play", plus pessimiste et controversée.

Donc, ici, nous l'avons. Pas une tasse de thé pour tout le monde, mais un bonnet de nuit (nightcap) légèrement étourdi pour les vieux amis qui ont besoin de ce dernier verre avant de se coucher pour rêver de ce qui aurait pu être".

Voici tout d'abord le titre "Critique Oblique", qui est sorti dans une version plus courte sur l'album "A Passion Play".  Les paroles de cette chanson sont totalement surréalistes et hermétiques, la musique est très rock et un peu déconcertante.


La chanson "Law of the Bungle" est basé sur un jeu de mots (entre jungle et bungle, qui signifie gaffe). Il s'agit d'une sorte de fable qui dit que connaître un tigre signifie que vous devez lui faire confiance et lui offrir votre gorge, se contenter de la deuxième part du gâteau et retirer quotidiennement les preuves sanglantes. Ce n'est pas une sinécure!


Dans "Law of the Bungle Part II", le guitariste Martin Barre dit qu'il est "un hibou aux plumes lisses". Nous sommes encore dans un délire verbal et dans le monde des fables.




1975 - Minstrel In The Gallery



Il s'agit du huitième album du groupe.

L'album se classe à la 20e place des charts britanniques et à la 7e place du Billboard 200 américain. En France, il atteint la 15e place des meilleures ventes d'album.

L'illustration de la pochette est un détournement d'une lithographie de Joseph Nash.

La chanson "Minstrel In The Gallery" décrit tous les gens ordinaires, avec leur faiblesse et leur ignorance, mais d'une manière aimante. Le ménestrel n'est qu'un observateur, essayant de les comprendre aussi bien que de les taquiner (comme quand on taquine quelqu'un pour le faire réfléchir, ou juste pour avoir une chance de vérifier sa réaction).

Le ménestrel n'a pas besoin de miroir pour se connaître, il regarde le public et se voit en lui. Il se rend compte comme il se doit que nous sommes tous égaux et pareils.

Le ménestrel dans la galerie est en fait Ian Anderson lui-même.

Voici une version live à Paris en 1975. Cela débute par un morceau folk avec Ian Anderson à la guitare acoustique avant que cela devienne un morceau rock très électrique.


"Baker Street Muse" est un morceau fleuve dans lequel Ian Anderson raconte tout ce qu'il voit en se promenant sur Baker Street (à cette époque Ian Anderson habite cette rue).




1977 - Songs From The Wood



Ce dixième album est le premier volet d'une trilogie folk rock qui comprend également les albums Heavy Horses (1978) et Stormwatch (1979). Il s'inspire principalement du folklore anglais, avec notamment une chanson faisant référence à Jack in the Green, un personnage des célébrations du 1er mai.

Il est enregistré en partie aux Morgan Studios de Londres et avec le studio mobile Maison Rouge à Fulham.

Le claviériste David Palmer, qui collaborait avec Jethro Tull depuis leur tout premier album, fait officiellement parti du groupe à partir de cet opus.

Cet album se classe à la 13e place des charts britanniques et à la 8e place du Billboard 200 aux États-Unis. Il sera certifié disque d'or au Canada et aux USA et disque d'argent au Royaume-Uni.

Dans le titre "Songs From The Wood", Ian Anderson se considère comme une sorte de ménestrel des temps modernes. Il fait l'éloge de la nature et nous chante des chants de la forêt afin de nous faire sentir mieux. Voici un live de 1977.




1978 - Heavy Horses



Cet onzième album est enregistré au studio Maison Rouge à Fulham en janvier 1978 et est le dernier où le bassiste John Glascock joue sur tous les titres. Par ailleurs, le violoniste de Curved Air, Darryl Way, y apparaît sur deux titres. Cet album se classe à la 20e place des charts britanniques et à la 19e place du Billboard 200 aux États-Unis.

Il s'agit encore d'un excellent album duquel j'ai extrait deux titres "Heavy Horses" et "Moths".

Dans "Heavy Horses", Ian Anderson se plaint que l'usage des chevaux dans l'agriculture est en déclin, et il souhaite leur retour.

Dans "Moths", il illustre la brièveté de la vie et comme les gens sont attirés par l'amour comme les papillons sont attirés par la flamme.

Voici les deux titres enchaînés dans un clip de l'époque.





1987 - Crest Of A Knave



Crest of a Knave est le seizième album studio de Jethro Tull sorti en 1987. Il remporte en 1989, de façon inattendue, le Grammy Award pour la « meilleure prestation hard rock ».

L'album est leur plus grand succès depuis les années 1970 et le groupe connait une résurgence d'émissions radiophoniques, d'apparitions dans des émissions spéciales de MTV et de diffusion de vidéoclips.

La chanson "Steel Monkey" parle des constructeurs de gratte-ciel. Elle montre un tournant vers du rock FM dans un style plus proche de groupes comme Foreigner ou Dire Straits.

Voici le clip du morceau.




Dans le titre "Budapest", Ian raconte l'aventure (réelle ou fantasmée ?) avec une jeune femme sportive à Budapest.




1995 - Roots To Branches


Roots to Branches est le dix-neuvième album studio de Jethro Tull sorti en 1995. 

Il porte les caractéristiques du rock progressif et du folk rock classique des années 1970 de Tull aux côtés du jazz et d'influences arabes et indiennes. Toutes les chansons sont écrites par Ian Anderson et enregistrées dans son studio personnel.

Le titre "Roots To Branches" apporte une vision de l'Inde entre pauvreté et religion.



Dans le titre "Valley", Ian Anderson raconte l'histoire de gens dans une vallée rouge qui ont une rivalité avec ceux qui habitent le bas de la vallée, il n'explicite pas où se trouve cette vallée. La musique a des accents orientaux.



Enfin, dans le morceau "Dangerous Veils", il est séduit par une beauté du désert, mais il se garde bien de regarder derrière ses "voiles dangereux".




1999 - J-Tull Dot Com


J-Tull Dot Com est le vingtième album studio du groupe Jethro Tull, sorti en 1999. Il sort quatre ans après leur album de 1995, Roots to Branches, et continue dans la même veine, alliant le hard rock aux influences orientales. 

C’est le premier album à présenter à la fois Andrew Giddings aux claviers et Jonathan Noyce à la basse, qui resteront avec le groupe jusqu’en 2007, donnant ainsi la plus longue formation ininterrompue de Jethro Tull. 

La chanson "Dot Com" parle d'une relation sur Internet: "I'll be yours, I'll be yours dot com".



2003 - The Jethro Tull Christmas Album



The Jethro Tull Christmas Album est le vingt-et-unième album studio du groupe.

Comme son titre l'indique, il tourne autour du thème de Noël et se compose de chants de Noël traditionnels comme God Rest Ye Merry, Gentlemen, de nouvelles versions d'anciennes chansons de Jethro Tull comme A Christmas Song et de compositions inédites d'Ian Anderson.

Ian Anderson reprend et adapte le très beau morceau de Gabriel Fauré intitulé "Pavane".



Il donne aussi son adaptation personnelle de "God Rest Ye Merry, Gentlemen".



Dans "First Snow on Brooklyn", il se rend à Brooklyn pour y retrouver une femme avec laquelle il a eu des relations, mais arrivé sur place il se ravise. Il pense qu'elle a refait sa vie et qu'il n'a pas à intervenir. Il repart sans la contacter.





2012 - Thick As A Brick 2



Cet album n'a pas été publié en tant qu'album de Jethro Tull, mais plutôt en tant qu'album solo de Ian Anderson. Or, dans la mesure où il s'agit d'une suite de "Thick As A Brick", il me semblait cohérent de citer cet album, d'autant plus qu'il est très réussi.

Les extraits musicaux proviennent du live en Islande que Ian Anderson a réalisé et dans lequel il donne l'intégralité des deux albums.

La première chanson "Wootton Bassett Town" raconte l'histoire d'un soldat en Irak et parle du coût humain de la guerre.



Dans "Banker bets, banker wins", il critique les banquiers qui gagnent tout le temps quels que soient les procédés utilisés, et qui trouvent toujours à se dédouaner.




2022 - The Zealot Gene



The Zealot Gene est le vingt-deuxième album studio du groupe britannique de rock Jethro Tull. Il est sorti en 2022 sur le label InsideOut Music. Il sort 19 ans après l'album précédent du groupe (si on excepte les albums solo de Ian Anderson). C'est volontairement que Ian Anderson a voulu sortir un album sous le nom du groupe, il trouvait cela normal après avoir joué 15 ou 16 ans avec les mêmes musiciens.

L'album fait montre d'une belle vitalité et d'une fidélité à l'esprit qui a fait le succès du groupe tout en le renouvelant, ce n'est donc pas un simple copier/coller des albums précédents et cela fait plaisir.

Je termine cet article avec le morceau au titre éponyme. Cette chanson est sur le fanatisme et est vraiment d'actualité.

Un fanatique est une personne qui poursuit un objectif singulier de tout son être, souvent motivé par des convictions religieuses ou politiques très fortes. A notre époque, de plus en plus de fanatiques ont émergé, leurs opinions amplifiées par les médias sociaux, on le voit bien dans la radicalisation des idées et l'agressivité ambiante. 

Dans cette chanson, le leader de Jethro Tull, Ian Anderson, se penche sur ce phénomène:

"Cela résume, pour moi, la nature conflictuelle des relations sociétales et les opinions extrêmes qui alimentent les feux de la haine et des préjugés, plus aujourd'hui peut-être qu'à aucun moment de l'histoire".

"Peut-être que vous pensez savoir à qui je pense ici, mais, en réalité, il y a probablement en ce moment au moins cinq personnalités nationales éminentes et dictatoriales qui pourraient faire l'affaire."

La chanson fait spécifiquement mention de Twitter: 
Un tonnerre déchirant sur Twitter
Et un gémissement de banshee hurlant
Vous avez trop d'opinions
Et un matou par la queue

Anderson a expliqué :

"Je ne suis pas du tout un gars de Twitter, mais 'nous savons qui' est l'archi-Twitterer de ces dernières années, qui a été à la fois cause de son succès et finalement de sa chute. C'est ce genre de véhémence ou de fanatisme, qui vient avec un point de vue très polarisé, qui divise, et qui veut endoctriner les gens."

Voici le clip qui a été réalisé par l'auteur de vidéos et de dessins animés Sam Chegini.





samedi 19 mars 2022

Kansas

 

Kansas

Kansas


Kansas est un groupe américain de hard rock progressif, originaire de la ville de Topeka, dans le Kansas, ce qui a donné son nom au groupe. Il est un des principaux représentants du rock progressif américain. 

Le groupe est créé en 1970 et devient célèbre avec les morceaux "Dust in the Wind" et "Carry On Wayward Son". 

Le groupe a publié de nombreux albums qui ont été multi-platine ("Leftoverture", "Point of Know Return" et "The Best of Kansas").

Au total, ils ont réalisé jusqu'à aujourd'hui 16 albums studio, 10 albums live et environ 7 compilations.

Au cours de leur plus de 50 années de carrière, le groupe Kansas a connu de très nombreux changements de personnel.

La photo ci-dessus illustre une des incarnations du groupe avec de gauche à droite: Phil Ehart (batterie), Steve Walsh (chant), Richard Williams (guitare), Billy Greer (basse) et David Ragsdale (violon).

Il faut noter également les membres suivants: Kerry Livgren, qui fut un des membres fondateurs du groupe et un de ses principaux auteurs-compositeurs, il a également joué de la guitare et des claviers. Robby Steinhardt qui fut longtemps le violoniste du groupe et qui est mort en 2021. Ronnie Platt est le chanteur actuel du groupe depuis le départ de Steve Walsh en 2014. Tom Brislin est le claviériste du groupe depuis 2018.

Le groupe est toujours actif aujourd'hui.

J'ai découvert ce groupe au début des années 80, et j'ai toujours aimé ce qui fait leur particularité: l'utilisation du violon (ce qui est assez rare dans un groupe de rock) et la qualité de leurs mélodies, ce qui contre-balance leur énergie et le côté hard rock.

Les paroles de leurs chansons sont assez marquées par leur foi chrétienne et un certain questionnement sur la signification de la vie et de ce que nous faisons du monde qui nous entoure.

Je vous ai préparé une petite anthologie tirée de la très belle discographie de ce groupe.


1974 - Kansas



Kansas est le premier album du groupe, au titre éponyme. On trouve dès ce premier album le son typique du groupe.

Dans cet album, j'ai sélectionné le morceau "Belexes" qui raconte l'histoire d'un jeune chef qui doit prendre des responsabilités alors que les prophètes n'ont prévu que du malheur. Il s'agit d'un morceau épique aux superbes riffs de guitares.



1975 - Song for America



On monte d'un cran avec l'album suivant.

J'ai choisi tout d'abord le titre éponyme du nom de l'album: "Song for America". On retrouve dans ce morceau des thèmes chers au groupe: ce que l'homme fait de son environnement et les malheurs de l'histoire. La chanson nous parle d'un pays magnifique et non touché par l'homme. Puis, les colons venus d'Europe sont arrivés, ils ont exterminé les indiens et saccagé la nature.

Voici une version live qui apparaît sur le DVD "There's know place like home" (2009). Dans ce concert, le groupe Kansas est accompagné par un orchestre symphonique.


Le morceau suivant est "Incomudro - Hymn to the Atman". Cette chanson encourage au recueillement intérieur et à la méditation. La vie est un cycle: devenir vieux c'est retourner d'où l'on vient. Un morceau typique du rock progressif par l'utilisation des claviers et sa longueur (12 minutes). On notera au passage le solo de batterie au milieu du morceau.



1976 - Leftoverture



Leftoverture est le quatrième album du groupe et certainement le sommet de sa discographie. De plus, j'adore cette pochette à l'allure médiévale avec ce personnage qui ressemble à Merlin.

Kerry Livgren a écrit pour cet album le morceau qui va devenir le tube international du groupe: "Carry on Wayward Son" ("Continue comme ça, mon fils rebelle"). Dans ce morceau, l'auteur s'adresse un encouragement personnel: "regarde et tu trouveras ce que tu cherches, tu trouveras la paix quand tu auras fini".

Voici le clip original de cette chanson. On remarquera la chevelure et la barbe flamboyantes du violoniste Robby Steinhardt.


La chanson suivante mérite bien son titre "Magnum Opus". Il s'agit bien d'un morceau majeur du groupe. Il exprime les paroles suivantes: "la musique est tout pour toi, c'est vraiment tout ce que nous avons à partager".

Voici une version live de 2017 donnée à Minneapolis.



1977 - Point of Know Return



Il s'agit du cinquième album du groupe et celui qui contient certainement les titres les plus célèbres: "Point of Know Return" et "Dust in the Wind".

L'album atteint la 4e place du Billboard 200 et sera certifié quadruple album de platine aux États-Unis en 1995 pour plus de quatre millions d'albums vendus. En France, il atteint la 16e place du classement des albums les plus vendus en 1978.

Dans la chanson "Point of Know Return", il s'agit d'un voyage en mer, avec notre héros rejoignant un équipage et se dirigeant vers l'océan. Il se demande quand le navire atteindra le point de non-retour. Il est d'ailleurs remarquable que Kansas ait écrit une chanson sur l'océan quand on sait que le Kansas est loin de la mer. On notera au passage l'orthographe spécifique du titre, alors qu'on aurait pu s'attendre à "point of no return". Cela donne un double sens: c'est à la fois le point de non-retour et le point où on "sait". La chanson peut également être comprise comme étant entièrement une métaphore et dans ce cas il s'agit d'un voyage intérieur.

Voici le clip officiel du morceau, avec Steve Walsh au chant.



Le titre suivant est certainement le plus célèbre du groupe "Dust in the Wind". Dans cette chanson Kerry Livgren nous dit que la vie n'a pas de sens, nos rêves et nos passions ne signifient rien, même l'argent ne peut acheter une seule minute, nous ne sommes que de la "poussière dans le vent".

Voici le clip officiel avec toujours Steve Walsh au chant.



Dans "Sparks of the Tempest", l'auteur nous dit qu'on est à la fin d'un cycle de 10000 ans, peut-être une fin de civilisation. Écrite en 1977, cette chanson est prophétique du monde d'aujourd'hui où tous nos faits et gestes peuvent être suivis grâce à internet et à l'informatique. La chanson fait d'ailleurs une référence à 1984 de George Orwell en mentionnant que le monde est surveillé par Big Brother.




1979 - Monolith



Monolith est le sixième album du groupe. On remarquera la très belle pochette qui représente un guerrier sioux devant une lune géante.

Il y a un titre qui pour moi se distingue sur cet album: "On the Other Side". Les paroles disent que tout le monde a besoin de croire: "Tourne-toi, c'est de l'autre côté. Cela provient de ton moi profond".

Voici le clip officiel, on notera la très belle mélodie de ce morceau.



1980 - Audio-Visions


Audio-Visions est le septième album du groupe, et pour moi l'un des trois sommets du groupe avec "Leftoverture" et "Point of Know Return". J'adore également la très originale pochette.

J'ai choisi trois titres de cet album.

Tout d'abord, un de mes morceaux préférés: "Relentless". L'auteur, Kerry Livgren, parle de sa conversion au christianisme. Il a trouvé la foi: "Je garderai mon cœur et mon esprit avec toi". Il l'a reçue comme un cadeau.



Voici ensuite "Hold On", une chanson dans laquelle Kerry Livgren veut convaincre et supplie sa compagne de croire aussi. Le morceau se présente comme une ballade aux accents celtiques.



Enfin, "Curtain of Iron" ("Rideau de fer") parle de la situation des gens en URSS avant la chute du mur: "leur liberté n'est qu'illusion, les enfants ne peuvent pas apprendre, nés prisonniers derrière un rideau de fer. Dans un pays d'ombre, le pouvoir croît".




1983 - Drastic Measures



Drastic Measures est le neuvième album studio du groupe. Sur cet album ne figure ni Robby Steinhardt qui a quitté le groupe pour un temps, ni Steve Walsh qui a été remplacé pour un temps par John Elefante.

On retrouve sur cet album le titre "Fight Fire with Fire". Dans cette chanson qui parle d'un temps de guerre, le héros est prêt à se battre jusqu'au bout et à combattre le feu par le feu.

Voici le clip officiel. Il s'agit d'un morceau plus hard et moins progressif, plus dans la lignée de groupes comme Foreigner ou Survivor.



"End of the Age" décrit une personne qui vieillit et se retrouve aux portes de la mort: "Seuls les élus entrent, il faut se détourner de l'orgueil et de la soif du gain, car il y en a peu qui passeront".




1988 - In the Spirit of Things



In the Spirits of Things est le onzième album studio du groupe sorti en octobre 1988. Steve Walsh est de nouveau au chant, mais il n'y a toujours pas de violoniste sur cet album.

J'ai sélectionné la chanson "Ghosts" qui parle d'une ville fantôme: "les épitaphes ont été effacées par le vent, qui a emporté les rêves des morts. Les fantômes sont revenus rêver".

Voici une version live de "Ghosts" auquel est ajouté le refrain de "Rainmaker". On notera les solos instrumentaux des guitares (dont un solo par Steve Morse) et du violon.




2016 - The Prelude Implicit



J'ai sauté quelques albums qui me semblent moins essentiels, et on se retrouve en 2016. The Prelude Implicit sort 16 ans après l'album précédent. Il s'agit d'un album beaucoup plus orienté rock progressif et qui marque l'arrivée du chanteur Ronnie Platt en remplacement de Steve Walsh.

Dans "Visibility Zero" l'auteur parle des gens qui mentent et qui veulent nous bercer d'illusions. On peut penser qu'il s'agit des politiciens (le clip ne laisse d'ailleurs aucun doute là-dessus). La chanson dénonce également notre monde matérialiste: "nous vivons dans un monde qui s'accélère et les choses qui nous entourent nous empêchent de voir".

Voici le clip officiel.



Le morceau phare de l'album est "The Voyage of the Eight Eighteen", un morceau progressif de 8 minutes qui exprime le rêve d'un paradis où tout ce qui existe vit en harmonie et où l'on garde l'innocence de l'enfance.




2020 - The Absence of Presence



Il s'agit du seizième album et du dernier en date (au moment où j'écris cet article). Kansas continue dans sa veine progressive dans la foulée de l'album précédent, et nous livre un album de rock progressif de très bonne qualité.

J'ai retenu trois titres dans cet album (mais j'aurais pu en sélectionner plus!).

Tout d'abord le titre "The Absence of Presence" qui évoque l'incommunicabilité: "Tu es là mais pas vraiment là. Je n'arrive pas à capter ton attention même si je t'appelle très fort". On peut penser qu'il s'agit des problèmes de communications de nos contemporains qui sont le plus souvent plongés dans leurs téléphones portables.

Voici un clip digital du morceau.



Ensuite, "Memories Down the Line" exprime qu'il faut envoyer nos souvenirs aux générations futures, pour partager notre expérience, car seule l'expérience compte, même si nous avons échoué". On peut supposer que l'auteur signifie que nous avons échoué à protéger notre planète et qu'il espère que les générations à venir feront mieux.

Voici le clip officiel.



Je termine cet article avec le titre "Never" qui parle du temps qui passe et des occasions ratées: "Je n'ai jamais dit les choses que j'aurais du dire afin que tu me connaisses. Je pense à tout l'amour à côté duquel je suis passé et que je n'ai pas vu".



mardi 15 mars 2022

Ukraine

 

Ukraine

Musique d'Ukraine


En cette période troublée il m'a semblé important de consacrer un article à l'Ukraine. La guerre est aux portes de l'Europe et c'est intolérable. Le peuple ukrainien souffre et le moins que l'on puisse faire est de leur apporter notre soutien.

L'homme est capable des pires choses: la guerre, qui ruine les peuples et répand la mort ... et des plus belles choses: l'art, cette chose superflue. Mais comme l'a dit Voltaire: "Le superflu, chose très nécessaire".

C'est pourquoi, je vais m'adonner à la chose que je sais le mieux faire, vous faire éprouver mon amour de l'art, de la musique, et partager avec vous un petit panorama de la musique ukrainienne du XIXème siècle à nos jours.

La musique ukrainienne est pour des raisons évidentes fortement liée à celle de la Russie voisine qui faisait en outre partie avec l'Ukraine de l'U.R.S.S.

Si des grands compositeurs tels Franz Liszt, Antonín Dvořák ou Piotr Ilitch Tchaïkovski utilisèrent des matériaux du folklore ukrainien, on peut noter l'existence de nombreux compositeurs nés sur le territoire ukrainien. Je vous propose donc d'aller à la découverte de certains d'entre eux. 

Ensuite je vous présenterai des exemples de musique traditionnelle et de groupe moderne.


Reinhold Glière (1874-1956)



Reinhold Moritsevitch Glière, né le 30 décembre 1874 (11 janvier 1875 dans le calendrier grégorien) à Kiev, et mort le 23 juin 1956 à Moscou, est un compositeur postromantique ukrainien, puis soviétique, d'origine allemande. 

On compte parmi ses maîtres Boris Liatochinski, un autre ukrainien.

Sur la recommandation de Taneïev, Reinhold Glière eut deux élèves : Prokofiev et Miaskovski. 

Glière a composé 3 symphonies, des concertos (dont un fameux concerto pour soprano colorature), des opéras, de la musique de chambre et des œuvres orchestrales.

C'est parmi ses œuvres orchestrales que j'ai choisi un poème-ballet intitulé "Les cosaques zaporogues" op. 64 (1921).

Les Cosaques zaporogues sont des Cosaques qui vivaient au-delà des Rapides du Dniepr (c'est-à-dire en amont), dans la région historique de l'Ukraine centrale dénommée Zaporoguie. 

Le nom Zaporogue vient de l'emplacement de leur forteresse, la Sitch, à Zaporijjia : "terre au-delà des rapides", de l'ukrainien za "au-delà" et poróhy "rapides".

J'ai sélectionné la version interprétée par Sir Edward Downes à la tête du BBC Philharmonic.


Voici cette oeuvre épique dans une version audio illustrée par le célèbre tableau d'Ilia Répine (1844-1930) : Réponse des Cosaques Zaporogues au Sultan Mehmed IV de l'Empire Ottoman.



Sergueï Prokofiev (1891-1953)



Sergueï Prokofiev (généralement appelé Serge Prokofiev en France) est un compositeur, un pianiste et un chef d'orchestre russe, né le 11 avril 1891 (23 avril 1891 dans le calendrier grégorien) à Sontsivka (en Ukraine, faisant alors partie de l'Empire russe) et mort le 5 mars 1953 à Moscou (URSS).

Il est l'auteur de nombreuses œuvres musicales allant de la symphonie au concerto, de la musique de film à des opéras ou des ballets. Il est, bien évidemment, l'immortel auteur de "Pierre et le Loup" qui reste pour de nombreux parents et grands-parents le meilleur moyen de faire découvrir la musique classique à nos jeunes enfants.

J'ai sélectionné un morceau qui m'est très cher, la romance extraite de la suite de concert "Lieutenant Kijé". Outre le fait que sa mélodie est sublime, il faut noter que son thème a été repris par Sting pour sa chanson "Russians" qui reste d'une troublante actualité.

En voici une version interprétée par Claudio Abbado à la tête du Chicago Symphony Orchestra:



Viktor Kossenko (1896-1938)


Viktor Stepanovytch Kossenko, né le 23 novembre 1896 et mort le 3 octobre 1938, est un compositeur, pianiste et éducateur ukrainien. Ses premières compositions sont fortement influencées par celles d'Alexandre Scriabine, Piotr Ilitch Tchaïkovski, Sergueï Rachmaninov et Mykola Lyssenko.

Sa musique allie le post-romantisme aux chants et musiques folkloriques slaves. Il a composé plus de 250 œuvres musicales, telles que la symphonie Poème moldave, et des ballades folkloriques.

Un musée lui est consacré à Kiev, en Ukraine. 

J'ai sélectionné l'album qui regroupe les 11 études en forme d'anciennes danses Op. 19 interprétées par Natalya Shkoda.



Et sur Youtube, j'ai choisi de vous présenter la Passacaille (extraite de ces 11 études Op. 19) interprétée par Anastacia Tolstonog. Il s'agit d'une pièce poignante.




Valentin Silvestrov (né en 1937)



Valentyn Vassyliovytch Sylvestrov est né à Kiev le 30 septembre 1937.

Il a tout d'abord fait partie de l'avant-garde de Kiev. Son style fait alors appel à la tonalité libre, le dodécaphonisme, la musique aléatoire, les clusters, le recours aux bruits et à l’électronique.

Sa musique s'orienta ensuite de plus en plus vers la confidence expressive. Ses œuvres récentes exploitent les ressources musicales du passé telles l’accord parfait et la gestuelle classico-romantique, souvent même avec une expression de nostalgie avouée.

Il fait partie des compositeurs favoris de la pianiste française Hélène Grimaud, qui nous interprète quelques-unes de ses œuvres dans ses deux derniers albums Memory et The Messenger.

Voici la superbe "Bagatelle III" par Hélène Grimaud.




Evgueni Stankovitch (né en 1942)



Evgueni Fedorovitch Stankovitch, né à Svaliava le 19 septembre 1942, est un compositeur contemporain ukrainien, de musique de ballet, de pièces pour orchestre de chambre, ainsi que des œuvres chorales. Ses œuvres sont jouées internationalement. 

Il est professeur de composition au Conservatoire de Kiev (aujourd'hui Académie nationale de musique d'Ukraine).

J'ai sélectionné deux œuvres de ce compositeur.

Tout d'abord, la Symphonie No. 2 "Héroïque" de 1975 interprétée par l'Orchestre Symphonique des Jeunes d'Ukraine. On y retrouve le côté sombre d'un Chostakovitch avec encore plus de dissonances.



Ensuite, voici le "Poème Ukrainien", interprété par Valeriy Sokolov, violon, l'Orchestre symphonique des jeunes d'Ukraine dirigé par Oksana Lyniv. Il s'agit d'une oeuvre très expressive.




Ukraine: Journey to Freedom



Les musiciennes Solomiya Ivakhiv (à gauche) et Angelina Gadeliya ont sorti en 2016 un album au titre qui me semble terriblement d'actualité: "Ukraine: Journey to Freedom".


 
Ce magnifique album nous permet d'entendre une anthologie de pièces pour violon et piano de compositeurs ukrainiens des XXème et XXIème siècles: Viktor Kossenko, Myroslav Skoryk, Ivan Karabits, Boris Lyatoshinsky, Alexander Shchetynsky, Valentin Silvestrov, Evgueni Stankovitch et Bohdan Kryvopust.

On retiendra en particulier les 2 Pièces Op. 4 de Viktor Kossenko, la sonate pour violon Op. 19 de Boris Lyatoshinsky et la superbe sonate "Post Scriptum" de Valentin Silvestrov.

Cet album est disponible sur la plupart des offres de streaming et on peut l'entendre en intégralité sous Youtube.


 

Musique traditionnelle ukrainienne

Située au carrefour de l'Europe et de l'Asie, la musique en Ukraine participe de ces deux influences, notamment par l'usage de modes mineurs (mixolydien, dorien, ionien, éolien) et de mélismes. Si l'harmonie peut y être complexe, le rythme est le plus souvent libre. La musique vocale y est prédominante sous toutes ses formes. Elle est souvent mêlée à des éléments archaïques paganistes ou animistes.

Le joueur de flûte de pan et d'instruments à vents traditionnels Maksim Popichuk diffuse sur sa chaîne Youtube de nombreux extraits de musique traditionnelle ukrainienne.

Voici une "Salutation dansante" qui mêle instrumentistes et danseurs.




DakhaBrakha



DakhaBrakha est un quatuor folklorique ukrainien qui combine les styles musicaux de plusieurs groupes ethniques. Il a remporté le prix national Shevchenko en 2020.

DakhaBrakha est un projet du Centre d'art contemporain de Dakh, dirigé par Vladyslav Troitskyi et né en tant que groupe faisant de la musique de théâtre en direct.
 
Le nom du groupe dérive des verbes ukrainiens Давати et Брати , signifiant respectivement "donner" et "prendre", tout en jouant également sur le nom du Centre d'art "Dakh" (littéralement "toit" en ukrainien).

Il s'agit d'un groupe très original qui a sorti 7 albums studio. Le dernier, intitulé "Alambari", est sorti en 2020.



Voici un morceau extrait de cet album: "Khyma". Le groupe mêle avec adresse folklore et modernité.