mercredi 7 août 2019

Respighi (Ottorino)


Ottorino Respighi



Ottorino Respighi


Ottorino Respighi, né à Bologne le 9 juillet 1879 et mort à Rome le 18 avril 1936, est un compositeur, musicologue et chef d'orchestre italien. Il a composé principalement des opéras, des ballets et de la musique orchestrale. Ses oeuvres les plus célèbres restent ses poèmes symphoniques notamment les « Pins de Rome » et les « Fontaines de Rome ». 

Son oeuvre reste aujourd’hui assez méconnue et il est peu joué au concert, je me propose de vous faire (re)découvrir les oeuvres qui me semblent les plus réussies.

Respighi a composé une série de poèmes symphoniques communément appelée la "Trilogia Romana" ("Trilogie Romaine") qui est constituées de trois poèmes symphoniques: « Fontane di Roma » (« Fontaines de Rome ») composé en 1916, « Pini di Roma » (« Pins de Rome ») composé en 1924 et « Feste Romane » (« Fêtes romaines ») composé en 1928. Chacun de ces poèmes symphoniques est constitué de quatre parties.


Les Fontaines de Rome



Les quatre mouvements des « Fontaines de Rome » décrivent quatre fontaines à quatre moments de la journée :
  • La fontana di Valle Giulia all'alba (La fontaine du Val Julia à l'aube) (Andante mosso) ; ambiance pastorale, un troupeau de bêtes passe tranquillement.
  • La fontana del Tritone al mattino (La fontaine du Triton le matin) (Vivo, Un poco meno allegretto, Più vivo gaiamente) ; un signal de cors avertit de l'arrivée de Tritons et Naïades qui viennent s'amuser parmi les jets d'eaux sous le soleil resplendissant.
  • La fontana di Trevi al meriggio (La fontaine de Trevi à midi) (Allegro moderato, Allegro vivace, Più vivace, Largamente, Calmo) ; c'est une allégorie du triomphe passé d'une victoire remportée par le dieu Neptune sur son char. C’est le mouvement le plus enlevé et à mon avis le plus réussi.
  • La fontana di Villa Medici al tramonto (La fontaine de la villa Medicis au coucher du soleil) (Andante, Meno mosso, Andante come prima). La journée s'achève sur un crépuscule mélancolique. Quelques oiseaux gazouillent encore. Au loin sonne l'angélus.   
Voici "Les Fontaines de Rome" par Herbert von Karajan:






Les Pins de Rome



Le cycle qui reste le plus connu est les « Pins de Rome » : il est divisé en quatre parties évoquant différents lieux et atmosphères de la Ville et de ses environs :
  • I pini della Villa Borghese (Les Pins de la Villa Borghese - Allegretto vivace. Vivace), illustrant des rondes et des jeux d'enfants, dans les jardins de la villa Borghèse,
  • Pini presso una catacomba (Pins près d’une catacombe - Lento), crescendo et decrescendo d'une mélodie mélancolique, issue des catacombes,
  • Pini del Gianicolo (Pins du Janicule – Lento), la nuit sur le Janicule – un des monts de Rome, le bruissement des branches et le chant d'un rossignol (utilisant un enregistrement sur disque ou bande magnétique),
  • I pini della Via Appia (Les Pins de la Via Appia - Tempo di marcia), sur les pavés de la Voie Appienne, une marche d'abord lointaine, se rapproche et des armées triomphantes défilent vers le Capitole. Ces légions faisaient passer au devant d'elles les prisonniers (pour le triomphe) et les blessés et pour cette raison on ne savait dire d'emblée si l'armée était victorieuse ou pas. Cet aspect historique est rendu dans la musique par un début indécis (l'observateur romain ne sait dire si la victoire est acquise ou pas) et une suite nettement plus allante (l'observateur romain aperçoit alors les armées victorieuses). C’est certainement le passage le plus réussi, qui n’est pas sans évoquer, de manière anticipée, la musique des péplums. Il faut d’ailleurs noter le côté cinématographique de ce poème symphonique. Des compositeurs de musiques de films comme John Williams ou Basil Poledouris reconnaissent d’ailleurs leur dette vis-à-vis de Respighi.

Les Pins de la Via Appia par Georges Prêtre:



Une version live exceptionnelle: les Pins de Rome par le Gimnazija Kranj Symphony Orchestra dirigé par Nejc Bečan:




Les Fêtes Romaines


Le troisième cycle est le moins connu et le moins joué, il mérite pourtant d’être écouté. Ce poème symphonique, comme les deux premiers de la trilogie, est structuré en quatre mouvements:
  • Circenses (Jeux du cirque), certainement la partie la plus réussie, elle évoque des combats de gladiateurs et le martyr des chrétiens livrés aux bêtes sauvages dans l’arène.
  • Giubileo (Jubilé) : L'approche des pèlerins vers Rome est illustrée par la vision du panorama à couper le souffle que l'on peut admirer à partir du Monte Mario et au son des cloches.
  • l’Ottobrata (Fête d'octobre) : Le solo du cor anglais évoque la récolte pendant que dans le fond, les cors rappellent la chasse. On entend le son des cloches et une sérénade amoureuse est jouée par la mandoline. 
  • la Befana (Épiphanie) : Le mouvement final se passe sur la Piazza Navona. Le son des trompettes évoque la clameur des chants et des danses romaines, y compris le déplacement d'un fêtard ivre représenté par un trombone ténor soliste. 
Je retiens la version interprétée par Lorin Maazel à la tête du Pittsburgh Symphony Orchestra, plutôt que la légendaire version d’Arturo Toscanini dirigeant le NBC Symphony Orchestra, principalement à cause de la prise de son trop datée et qui, malheureusement, ne rend pas justice à la somptueuse orchestration de Respighi. 

En vidéo, voici "Les fêtes romaines" par Vasily Petrenko:





A noter également des versions aux couplages intéressants:
  • les Fontaines de Rome et les Pins de Rome couplés aux “Antique danze ed arie per liuto” (“Danses et airs antiques pour luth”) par Herbert von Karajan dirigeant le Berliner Philharmoniker. 
  • les Fontaines de Rome et les Pins de Rome couplés aux “Oiseaux” et aux “Impressions Brésiliennes” par Antal Dorati à la tête du London Symphony Orchestra et du Minnesota Symphony Orchestra.



Le Triptyque de Botticelli


En 1927, Respighi compose le “Trittico botticelliano” (“Triptyque de Botticelli”). Dans cette oeuvre, Respighi décrit trois tableaux de Botticelli qui sont tous exposés dans la galerie des Offices à Florence: 

“Le Printemps”: ce tableau est une allégorie du Printemps où l’on voit des personnages mythologiques tels que Mercure, les trois Grâces, Vénus survolée par Cupidon, Flore en majesté (qui est peut-être une représentation symbolique de la ville de Florence), Chloris la nymphe des fleurs qui est la première incarnation de Flore, et enfin Zéphyr, dieu du vent. La musique de Respighi est une sorte de marche joyeuse à l’instrumentation fouillée qui fait un peu penser aux premiers ballets de Stravinsky.



“L’adoration des mages”: Il montre Jésus enfant qui vient de naître, entouré de sa mère Marie, de son père Joseph, un peu en retrait. Les rois mages, que l'on peut reconnaître à leur âge respectif, sont accompagnés de leur cortège. A noter que le peintre s’est représenté dans le personnage de droite. Dans la musique de Respighi, les trois mages sont représentés respectivement par le basson, le hautbois et la flûte. La musique est un peu orientalisante et fait penser à Rimsky-Korsakov qui fut le maître de Respighi, ou bien encore au Moussorgsky des “Tableaux d’une exposition”.



“La Naissance de Vénus”: Dans ce tableau Botticelli magnifie la beauté de la femme dans sa nudité. Vénus naît dans une grande coquille Saint-Jacques, elle est entourée de Zéphyr et d’un personnage féminin symbolisant la Brise, et à droite d’une des Heures (fille de Jupiter et de Thémis) qui lui tend une étoffe pour recouvrir sa nudité. Il s’agit pour moi du sommet de ce triptyque musical, la musique se révèle d’une grande finesse et d’une inspiration proche de l’impressionnisme musical. On y ressent la présence d’un élément aquatique qui n’est pas sans évoquer "La Mer" de Debussy ou bien une “Une barque sur l’océan” de Ravel.



Des versions que j’ai écoutées, ma préférence va à celle dirigée par Geoffrey Simon à la tête du Philharmonia Orchestra. Le couplage est intéressant, il nous permet d’entendre des œuvres comme la “Ballade des Gnomes” ou la très belle “Suite en sol majeur pour cordes et orgue”.

Voici "La Naissance de Vénus" par Geoffrey Simon:




Belkis, Reine de Saba


Enfin, en 1930-1931, Respighi compose le ballet “Belkis, reine de Saba”. Il en tire ensuite une suite qui sera publiée en 1934. 

Cette suite est en quatre parties:
  • “Le rêve de Salomon”: Salomon rejette ses favorites pour rester seul. Il demande à son scribe d’écrire une lettre d’invitation pour Belkis, la reine de Saba. Quand le roi et la reine se rencontrent, celle-ci est éblouie par la gloire de Salomon et tombe à ses genoux. La musique est lente, on entend une mélopée du hautbois accompagné du célesta. Puis apparaît une marche scandée par des percussions, le triangle et les trompettes. On sent une influence de Rimsky-Korsakov dans le chatoiement des couleurs de l’orchestre et le côté orientalisant. Un solo de violoncelle fait la transition avec la seconde partie qui évoque la rencontre. La marche initiale reprend, en un peu moins scandé.
  • “La danse de Belkis à l’aube”: Belkis se réveille après avoir rêvé de Salomon. Elle danse en l’honneur du soleil levant. On entend la flûte, accompagnée de percussions, qui joue une mélodie orientale. Le célesta, qui égrène ses notes, ajoute un côté féérique à l’ambiance. Ensuite, le hautbois et la flûte reprennent ensemble le discours. Une lente mélopée exprime la danse de Belkis, un thème voluptueux apparaît à la clarinette, bientôt repris par les cordes.
  • “Danse de guerre”: C’est la célébration de la présence de la reine à Jérusalem. De jeunes hommes amènent des tambours et dansent en frappant des pieds. La musique laisse entendre des fanfares martiales accompagnées des percussions et des tambours. Un piccolo joue un thème oriental, puis la musique passe à un rythme véritablement endiablé et se fait très cinématographique.
  • “Danse orgiaque”: Salomon organise une fête en l’honneur de la reine dans ses jardins. La musique se fait tour à tour sensuelle et guerrière. A la fin du mouvement, on voit le roi et la reine assis sur des trônes élevés, sans mouvement, tels des idoles. Tout l’orchestre joue une sorte de Bacchanale endiablée. Lors d’une transition plus lente apparaît une voix de ténor dans le lointain. Ensuite, le rythme vif réapparaît avec de nombreuses percussions. On entend des fanfares à la Moussorgsky. Le morceau se termine dans un finale grandiose. 
Il n’existe pas beaucoup de versions de cette oeuvre. Personnellement, j’ai entendu la version dirigée par Eiji Oue à la tête du Minnesota Orchestra qui me semble tout à fait réussie.

Voici "La danse orgiaque" par Andrea Battistoni:






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