mercredi 15 juin 2022

Sohy (Charlotte)

 



Charlotte Sohy


Charlotte Sohy comme de nombreuses compositrices est tombée dans l'oubli. Deux dates importantes sont à noter en ce qui concerne la nouvelle reconnaissance de son oeuvre: le 6 juin 2019 est créée sa Symphonie "Grande Guerre" Op. 10 par l'orchestre Victor Hugo Franche-Comté sous la direction de Debora Waldman, et le 22 avril 2022 date à laquelle sort un coffret de 3 CD consacrés à la compositrice par l'éditeur "La Boîte à Pépites", une première discographique pour elle.

Née le 7 juillet 1887 à Paris dans une famille d’industriels, Charlotte Sohy reçut un enseignement très complet à la Schola Cantorum, dont l’entrée lui fut facilitée par Mel Bonis. 

Amie d’enfance de la future pédagogue Nadia Boulanger, Sohy fut reçue dans la classe de piano et d’harmonie de Georges Marty, celle d’Alexandre Guilmant puis de Louis Vierne pour l’orgue, et surtout celle de Vincent d’Indy, directeur de l’établissement et disciple de César Franck, pour la composition.

Elle obtint pour ses projets musicaux l’entier soutien de sa famille qui fit même installer un orgue Cavaillé-Coll à domicile. C’est dans l’établissement de la rue Saint-Jacques qu’elle fera la rencontre en juin 1909 de son futur époux, lui aussi compositeur, Marcel Labey (1875-1968), avec qui elle travaillera main dans la main sur plusieurs œuvres. 

Pour masquer une féminité encore problématique dans la carrière de compositrice, Charlotte Sohy signa d’abord ses oeuvres « Ch. Sohy » ou « Charles Sohy », nom de son grand-père musicien qu’elle emploiera également pour les livrets d’opéra écrits pour elle-même ou à l’attention de Marcel. Elle utilisera également « Louis Rivière » ou « Claude Vincent ».

Comme compositrice, Charlotte Sohy est l'auteur de messes, de mélodies, de pièces pour piano, de trios, de quatuors à cordes, ainsi que d'une symphonie, La Symphonie "Grande Guerre", et d'un drame lyrique, "L'Esclave couronnée". Elle laisse en tout 35 numéros d'opus.

Charlotte Sohy meurt à Paris le 19 décembre 1955 à l'âge de 68 ans. Après sa mort, ses œuvres ne sont pas éditées ou enregistrées. Il faut attendre 1974 pour que son petit-fils François-Henry Labey, musicien de formation, soit désigné par ses tantes et oncles comme ayant-droit auprès de la SACEM, et commence à faire l'inventaire des manuscrits de sa grand-mère. 

La conséquence ultime en est la sortie de ce coffret de 3 CD sur le label "La Boîte à Pépites" de l'association "Elles Women Composers", créée en 2020. On y trouve 13 des opus de Charlotte Sohy: de la musique orchestrale, de la musique de chambre et de la musique pour piano.

D'autre part, La Boîte à Pépites a mis sous Youtube un résumé très bien fait de la vie de Charlotte Sohy.




Je vous invite à explorer les œuvres les plus marquantes de Charlotte Sohy.


Symphonie en ut dièse mineur "Grande Guerre" Op. 10 (1914-1917)



Le premier mouvement, sombre, lyrique et tourmenté, fut terminé le 18 novembre 1914. 

Au mois d’avril suivant, elle reçut une dépêche lui annonçant la mort de son époux. Labey était certes sérieusement blessé, mais survivra un demi-siècle après l’Armistice. Charlotte le crut mort pendant une semaine avant de recevoir un démenti. 

Elle se plongea aussitôt dans l’écriture du mouvement suivant, à l’esprit bucolique et plein d’espièglerie, certes voilé de quelques nuages, mais d’humeur plutôt radieuse. Cette partie centrale achevée le 14 juillet 1915, Sohy laissa de côté la partition, pour ne la terminer qu’en 1917, en écrivant l’ambitieux final, et en orchestrant le tout.

A ma connaissance, il n'existe pas encore de disque donnant cette symphonie, mais on peut bénéficier sous Youtube de l'interprétation de cette oeuvre par l'Orchestre National de France dirigé par Debora Waldman.



Le concert de la création de la Symphonie est disponible sous Vimeo. La seule contrainte est que vous devez vous créer un compte si vous n'en avez pas (cela prend deux minutes).


CHARLOTTE SOHY Symphonie Grande Guerre from jeremy rozen on Vimeo.


Musique Orchestrale



Un des trois CD du coffret est consacré à la musique orchestrale. J'en ai extrait les œuvres suivantes.

Thème varié Op. 15 pour violon et orchestre (1921/1925)

Dédié à son amie d’enfance Nadia Boulanger, le Thème varié, dans sa version originale pour violon et piano, a été terminé le 23 septembre 1921 à Mézilles (Yonne). Cette oeuvre a été orchestrée quelques années plus tard par la compositrice, sans doute après 1925 d’après le graphisme du manuscrit d’orchestre. Il s'agit d'une pièce mélancolique au style néo-romantique.

En voici une version dirigée par Debora Waldman à la tête de l'Orchestre national Avignon-Provence.



Histoire sentimentale Op. 34 (1952)

Cette oeuvre est en 4 parties:

I. Rencontre au bord du ruisseau - II. Amourette - III. Absence - IV. Oubli

On suppose qu'il s'agissait d'une musique de film, mais on ne sait pas lequel, et le projet n'a pas abouti.

Voici la partie finale: Oubli. Une pièce dynamique à l'orchestration intéressante dirigée par Debora Waldman à la tête de l'Orchestre national Avignon-Provence.




Musique de Chambre




Un autre CD du coffret est consacré à la musique de chambre. 

Triptyque Champêtre Op. 21 (1925)


J'ai sélectionné le délicieux triptyque champêtre pour flûte, violon, alto, violoncelle et harpe interprété par le Quatuor Hermès, Mathilde Calderini (flûte) et Constance Luzzati (harpe).


Voici, en extrait, le deuxième mouvement "Au fil de l'eau" où l'on peut bien se représenter l'eau qui coule.





Musique pour Piano



Contrairement à ce que le titre de cet album pourrait faire penser, il ne s'agit pas uniquement de pièces pour piano seul, mais également de pièces de musique de chambre avec piano.

J'ai réellement été conquis par cet album et j'en ai extrait de nombreuses pièces.

Octobre Op. 23 n° 1 pour violoncelle et piano (1921)

La pièce nous laisse entendre un thème mélancolique et une partie centrale plus animée. Elle est interprétée par Heloïse Luzzati (violoncelle) et Célia Oneto Bensaid (piano). Une oeuvre d'une superbe facture.



Trio Op. 24 (1931)

Terminée en 1931, cette oeuvre occupe une place centrale dans la production de musique de chambre de Charlotte Sohy.

Elle est en 3 mouvements:
  1. I. Allegro: à la fois mystérieux et jubilatoire dans le final 
  2. II. Andante: calme et serein
  3. III. Allegro: très rythmique et virtuose
Voici le 3ème mouvement du trio interprété par Xavier Phillips (violoncelle), Célia Oneto Bensaid (piano) et Nikola Nikolov (violon).




Fantaisie Op. 3 (1907)

Charlotte Sohy a tout juste 20 ans lorsqu'elle compose cette fantaisie qui semble s'inspirer de la fantaisie Op. 49 de Chopin dans la même tonalité de fa mineur. Malgré la jeunesse de la compositrice la pièce impressionne par sa maîtrise et son lyrisme.

La voici interprétée par David Kadouch.



Sonate Op. 6 (1909-1910)

Charlotte Sohy a 22 ans lorsqu’elle compose sa sonate pour piano.

L'oeuvre est en 3 mouvements:
  1. I. Allegro: avec deux thèmes qui s'opposent, le premier est passionné et tumultueux, le second calme et serein
  2. II. Andante con moto: méditatif
  3. III. Rondo vivace: inspiré par des danses bretonnes, il fait appel à une écriture contrapuntique
Voici le 3ème mouvement interprété par Célia Oneto Bensaid.



      Quatre Pièces Romantiques Op. 30 (1944)

      On termine cet aperçu de l'oeuvre de Charlotte Sohy par ces 4 pièces pour piano.

      Elles ont les titres suivants:
      • I. Le Ruisselet
      • II. Valse
      • III. Berceuse
      • IV. Romance sans paroles

        Voici la charmante Valse interprétée par Marie Vermeulin.




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