lundi 26 septembre 2022

Rameau

 

Rameau



Jean-Philippe Rameau


Jean-Philippe Rameau est un compositeur français et théoricien de la musique, né le 25 septembre 1683 à Dijon et mort le 12 septembre 1764 à Paris.

D'aucuns disent que s'il était mort avant ses cinquante ans, il aurait été considéré comme un musicien raté, à tout le moins comme un compositeur mineur. En effet, et c'est un fait rarissime dans la musique, Rameau commença sa carrière dans le domaine lyrique uniquement après ses cinquante ans et nous laisse une trentaine de chef-d’œuvres de l'art lyrique.

Il ne manqua pas d'être un compositeur controversé; un artiste de cet âge n'allait-il pas donner des œuvres démodées alors que certains considéraient à l'époque que la tragédie lyrique française était déjà un art dépassé ?

Cette controverse donna lieu dans les années 1752-1754 à la célèbre Querelle des Bouffons qui opposa le coin du roi et les défenseurs de la musique française qui soutenaient Rameau, et le coin de la reine réunis autour du philosophe Jean-Jacques Rousseau qui étaient pour une italianisation de l'opéra français et auxquels se sont joint Friedrich Melchior Grimm, le Baron d'Holbach et les encyclopédistes Diderot et d’Alembert.

Personnellement, entre les tragédies lyriques de Rameau et les œuvres de Rousseau ou bien la "Serva Padrona" de Pergolesi, qui fut le déclencheur de la querelle, il n'y a pas photo, et ma préférence va nettement au génie de Rameau.

Rameau était également un théoricien remarquable qui a publié en 1722 un ouvrage de référence le "Traité de l'harmonie réduite à ses principes naturels". Il a écrit au total quatre ouvrages de théorie de la musique.

En tant que compositeur, il nous laisse 76 œuvres dont des pièces pour clavecin, de la musique de chambre, des motets, des canons, des airs, des cantates et ses opéras et musiques de scène. Ce sont ces dernières œuvres qui assureront sa gloire après une éclipse de deux cents ans.

En ce qui me concerne, mes œuvres préférées sont ses pièces pour clavecin et ses opéras. Je vous ai donc préparé une petite sélection de dix œuvres. Les œuvres sont présentées dans l'ordre de classement du RCT (Rameau Catalogue Thématique), un catalogue thématique des œuvres de Rameau réalisé en 2007 par Sylvie Bouissou et Denis Herlin.

D'autre part, j'ai préparé un florilège de musique baroque française. J'ai sélectionné une vingtaine de compositeurs français parmi lesquels les plus connus sont Lully, Charpentier, Marais, Couperin et, bien sûr, Rameau.

Voici les liens vers la playlist.

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Premier livre de clavecin - Suite en la mineur RCT 1 (1706)



Le Premier livre de pièces de clavecin de Jean-Philippe Rameau paraît en 1706 lors du premier séjour de Rameau à Paris. 

Le musicien est alors âgé de vingt-trois ans. C'est aussi la toute première des œuvres que nous possédons de lui.

Il s'agit d'un ensemble de neuf pièces en La mineur/majeur qui suit de façon assez libre la structure de la suite de danses classique.

J'ai sélectionné un album d'Olivier Baumont qui nous permet d'entendre en entier ce premier livre de clavecin. L'album nous offre en couplage le second livre et une pièce isolée "Les petits marteaux".

Voici la Gigue extraite de cette suite en la mineur par Olivier Baumont. Il s'agit d'une pièce sautillante et enlevée.



"Les petits marteaux" constituent une petite pièce charmante et humoristique.





Deuxième livre de clavecin RCT 2 & 3 (1724)




Le Deuxième livre de pièces de clavecin de Jean-Philippe Rameau a pour titre exact : "Pièces de clavecin avec une méthode pour la mécanique des doigts".

Le recueil est édité en 1724, alors que Rameau est déjà installé définitivement à Paris et rendu célèbre par son Traité de 1722.

Le recueil est composé de deux suites. La première suite en mi mineur est composée de pièces traditionnelles de la suite et de pièces de caractère aux noms évocateurs. La seconde suite en ré majeur n'est composée que de pièces de caractère, la plupart sont en forme de rondeau.

Plusieurs morceaux seront transcrits plus tard et intégrés dans des œuvres lyriques : L'Entretien des Muses, la musette en rondeau et le célébrissime "Tambourin" (dans les Fêtes d'Hébé), les Niais de Sologne (dans Dardanus) et les Tendres Plaintes (dans Zoroastre).

J'ai sélectionné un excellent album interprété par Trevor Pinnock qui nous donne de larges extraits de ce deuxième livre (couplé à une grande partie du troisième livre).

Voici quelques extraits de ces deux suites.

Extrait de la première suite en mi, voici le célèbre "Tambourin".



On continue, avec des extraits de la seconde suite en ré. Tout d'abord "Les tendres plaintes" interprétées par Jean Rondeau, une pièce mélancolique pleine d'amour.



"Les Niais de Sologne", une pièce pleine d'humour et de malice.



On termine avec "Les Cyclopes", une pièce virtuose dont Trevor Pinnock nous donne la meilleure version.





Troisième livre de clavecin RCT 5 & 6 (1728)




Le Troisième livre de pièces de clavecin a pour titre exact "Nouvelles Suites de Pièces de Clavecin". C'est le dernier recueil pour clavecin seul édité par Jean-Philippe Rameau, en 1728. Par la suite, Rameau ne composera plus pour le clavecin seul, mis à part une pièce isolée pour une occasion spécifique : La Dauphine en 1747.

Comme le recueil de 1724, celui-ci comprend deux suites dont seule la première contient les danses traditionnelles, allemande, courante et sarabande, mais sans gigue. On trouve ensuite une majorité de pièces de caractère.

Plusieurs pièces seront transcrites plus tard pour être incluses dans des œuvres lyriques : Les Sauvages (dans les Indes galantes), le Menuet I (dans Castor et Pollux), la Sarabande (dans Zoroastre).

J'ai sélectionné un album qui me suit depuis des années et qui a accompagné mes premières découvertes de Rameau, il s'agit des "Nouvelles Suites" interprétées par William Christie au clavecin.

Voici quelques extraits de ce troisième livre par des interprètes divers.

La Gavotte et ses six doubles par William Christie. Les six doubles constituent des sortes de variations sur le thème de la Gavotte.



"La Poule" est certainement un des morceaux les plus charmants et les plus drôles de Rameau qui imite à la perfection la poule. La voici interprétée par Trevor Pinnock.



On termine avec un des thèmes les plus connus de Rameau, "Les Sauvages" que l'on retrouve dans son opéra les Indes Galantes. Les voici par Jean Rondeau. On ne peut imaginer thème plus dansant.





Pièces de clavecin en concerts RCT 7-11 (1741)



Les Pièces de clavecin en concerts de Jean-Philippe Rameau, publiées en 1741, constituent le seul exemple de musique de chambre du compositeur et ont été composées en pleine maturité : elles sont de loin postérieures à ses œuvres pour clavecin seul, à sa musique religieuse et se situent après ses premiers chefs-d'œuvre lyrique.

Ces pièces sont constituées de 5 concerts (RCT 7 à 11), eux-mêmes composés de différentes pièces dont la plupart ont des titres évocateurs: Le Vézinet, La Rameau, La Forqueray, La Marais ...

Ces pièces ont également été transcrites pour sextuor.

Voici la première pièce du cycle, La Coulicam (ce dernier est un personnage réel, usurpateur du trône de Perse au XVIIIème siècle). Les interprètes sont Christophe Rousset (clavecin), Kaori Uemura (viole de gambe) et Ryo Terakado (violon).






Motet In Convertendo RCT 14 (avant 1720, révisé en 1751)



Rameau a laissé peu de musique religieuse, alors qu'il a été une grande partie de sa vie organiste. Il faut également noter qu'il ne nous a laissé aucune oeuvre pour orgue. Il semble que lorsqu'il s'est lancé sur le tard dans la carrière de compositeur d'opéras, il ait voulu faire table rase de son passé. Et, en effet, nous avons très peu de renseignements biographiques avant ses quarante ans.

Il donna néanmoins le motet In Convertendo au Concert Spirituel, après l'avoir considérablement remanié. C'est ce motet que je vous propose d'écouter dans la version de William Christie à la tête des Arts Florissants.




Les Boréades RCT 31 (1763)




C'est paradoxalement avec une oeuvre de la fin de la vie de Rameau que je commence l'exploration de son oeuvre lyrique. Les Boréades est en effet une des dernières œuvres du compositeur, écrite à plus de 80 ans. Elle ne fut jamais jouée du vivant de Rameau: quelques répétitions eurent lieu, mais Rameau meurt d'une "fièvre putride" le 12 septembre 1764, et l'oeuvre fut immédiatement retirée du programme des représentations. 

Il fallut attendre près de deux siècles et leur création triomphale en 1982 à Aix-en-Provence par John Eliot Gardiner. Les représentations furent suivies de la publication par Erato d'un superbe coffret que j'ai sélectionné.

Les Boréades constituent une des dernières grandes œuvres de la musique baroque. L’auteur du livret reste incertain même s’il est souvent attribué à Louis de Cahusac, librettiste de nombreuses œuvres de Rameau mais décédé quelques années auparavant.

Alphise reine de la Bactriane doit épouser un des descendants de Borée, les princes Calisis et Borilée, également appelés les Boréades, mais elle aime un étranger, Abaris. Celui-ci aime également Alphise et les deux amants s'assurent de leur amour mutuel. 

Calisis et Borilée, apprenant qu'Alphise leur préfère un autre, en appellent à Borée qui déchaîne les éléments et enlève Alphise dans un tourbillon. Abaris demande son aide à Apollon qui lui envoie la muse Polymnie (son entrée est marquée par un thème magnifique). 

Pendant ce temps Borée continue de menacer Alphise si elle ne choisit pas son époux parmi ses prétendants. Apollon arrive alors et déclare qu'Abaris est son propre fils et celui d'une nymphe descendante de Borée, donc plus rien ne s'oppose à son union avec Alphise. L’amour, le plaisir et la joie sont établis à la demande d’Apollon ; la compagnie commence à danser et les amoureux célèbrent leur triomphe.

Voici la suite des Boréades interprétée par Riccardo Minasi à la tête de l'Orchestre Radio Symphonique de Francfort. (L'entrée de Polymnie intervient à 6'23).



Voici l'entrée de Polymnie, seule, dans la version de John Eliot Gardiner.






Dardanus RCT 35 (1739)




Dardanus est une des plus célèbres tragédies lyriques de Rameau. Le livret de Charles-Antoine Leclerc de La Bruère, d'après les Métamorphoses d'Ovide, comporte un prologue et cinq actes. Il a été beaucoup critiqué pour sa niaiserie, mais cela n'empêcha pas Rameau de nous fournir un grand nombre de très belles pages.

J'ai sélectionné la version de Marc Minkowski dirigeant les musiciens du Louvre avec des solistes prestigieux tels que John Mark Ainsley, Véronique Gens et Laurent Naouri.

Voici l'ouverture.



Premier Tambourin, Deuxième Tambourin.



L'air "Cesse, cruel amour" interprété par Véronique Gens dans le rôle d'Iphise.



Voici l'air fameux "Monstre affreux, monstre redoutable" interprété par Florian Sempey dans la version de Raphaël Pichon. On notera la formidable tenue portée par le personnage!



Enfin, voici la Chaconne finale de l'acte 5.





Les Indes Galantes RCT 44 (1735)




Les Indes Galantes est certainement l'oeuvre la plus connue et la plus jouée de Rameau et le chef-d'oeuvre absolu de l'opéra-ballet.

Composée sur un livret de Louis Fuzelier, cette oeuvre est constituée d'un prologue et de 4 entrées qui constituent 4 histoires indépendantes:
  • Le Turc généreux
  • Les Incas du Pérou
  • Les Fleurs, fête persane
  • Les Sauvages
J'ai sélectionné la version de William Christie à la tête des Arts Florissants.

Voici l'ouverture.



On continue avec le chœur "Tendre Amour", extrait de la troisième entrée "Les Fleurs" par William Christie. On remarquera l'extrême délicatesse de cette pièce, et la ferveur et le sentiment des chanteurs, on touche au sublime.




Voici certainement le passage le plus célèbre et le plus humoristique des Indes Galantes, l'air "Forêts Paisibles" extrait de la quatrième entrée "Les Sauvages". Sandrine Piau interprète Zima et Lisandro Abadie, Adario.

Damon professe l’inconstance, Don Alvar l’amour sérieux et exclusif. Mais Zima ne veut ni d’un époux volage, ni d’un époux jaloux. Elle leur préfère Adario. La Danse du grand calumet de la paix, scelle l'union de Zima et d'Adario, en même temps que la réconciliation entre les Sauvages et les Européens.



Terminons avec la Chaconne finale par les Arts Florissants.






La Naissance d'Osiris RCT 48 (1754)



La Naissance d'Osiris, ou la Fête Pamilie est un acte de ballet composé par Jean-Philippe Rameau sur un livret de Louis de Cahusac. 

Cette œuvre fut écrite pour célébrer la naissance du duc de Berry, petit-fils de Louis XV et futur roi Louis XVI, et créée à Fontainebleau le 12 octobre 1754. Il ne s'agit pas d'une des œuvres les plus connues de Rameau, mais je suis toujours envoûté par sa musique charmante.

J'ai sélectionné la version de la Capella Savaria dirigée par Mary Térey-Smith qui interprète la suite orchestrale.

Voici l'ouverture, une musique très pastorale.



On continue avec la musette.



Les très joyeux "Premier et deuxième tambourin".



La contredanse.



Et, pour les grands amateurs de Rameau, je vous propose la version intégrale de l'acte de ballet par William Christie.





Platée RCT 53 (1745)




Platée est une comédie lyrique, qualifiée de "ballet bouffon" à sa création, le 31 mars 1745 à Versailles, à l'occasion du mariage du fils de Louis XV, le dauphin Louis, avec l'infante espagnole Marie-Thérèse.

"Certains esprits rieurs verront de nombreuses allusions à cet hymen dans l'intrigue entre Jupiter et Platée, notamment à cause de la réputation de laideron qui précédait la pauvre Marie-Thérèse. On ne peut que se réjouir que malgré cette discrète insolence Rameau ait peu après obtenu le poste de Maître de Musique de la Chambre du Roy".

L'œuvre se compose d'un prologue et de trois actes, sur un livret tiré de Platée ou Junon jalouse, du dramaturge Jacques Autreau, inspiré des Béotiques, IXe livre, chapitre III, de la Description de la Grèce, du géographe-historien grec Pausanias.

Jean-Philippe Rameau avait acheté les droits de cet ouvrage, et demanda à l'homme de lettres Adrien-Joseph le Valois d'Orville et à Ballot de Sauvot d'en renforcer l'aspect comique, notamment par l'ajout du personnage de la Folie (porte-parole du compositeur lui-même) et d'une quantité désopilante de rimes en oi qui nous rappellent sans cesse que nous sommes au royaume des grenouilles. 

On reproche souvent au livret de ne pas être à la hauteur de la partition. Cependant, lors de la création, le public n'a pas dû être si sévère, puisqu'on était déjà au quatrième jour de festoiement des noces princières.

Le spécialiste de cette partition semble être Marc Minkowski qui en a donné plusieurs représentations dans une très originale mise en scène de Laurent Pelly en 2002, spectacle repris en 2022.

Voici l'ouverture.



L'air "Quittez, Nymphes, quittez" interprété par Paul Agnew qui campe superbement Platée.



L'Orage.



L'air de la Folie: "Formons les plus brillants concerts", suivi de "Aux langueurs d'Apollon". Mireille Delunsch est insurpassable d'humour dans le rôle de la Folie. La voici, en version concert, qui tente de prendre la place de Marc Minkowski au pupitre. Inénarrable!



Terminons avec l'air final "Chantons Platée, égayons-nous", où tout le monde se moque de Platée, à son grand désarroi.



Et, pour les fans, la version intégrale (d'une meilleure qualité vidéo).







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